Les réactions photocatalytiques sont un sujet d’actualité, mais passer de l’échelle du laboratoire à l’échelle industrielle reste un défi. Le consortium PhotoScale concevra un photoréacteur à disque rotatif qui permettra de réaliser des réactions photocatalytiques intéressantes sur le plan pharmaceutique à une échelle relativement grande.

« Lorsque la photocatalyse est apparue dans les années 1970, elle a connu une mort lente, en partie à cause du manque de progrès technologique » explique Timothy Noël, professeur de chimie des flux à l’Université d’Amsterdam et l’un des principaux chercheurs du consortium PhotoScale. Dernièrement, il a remarqué que la photocatalyse devenait une activité en plein essor. « La technologie a également beaucoup progressé depuis le temps. Quelque chose que nous utilisons maintenant nous-mêmes au sein du consortium, et que nous voulons transposer à la production. »

Outre le groupe de Noël, PhotoScale est composé de Janssen Pharmaceutica R&D, de Signify (anciennement Philips Lighting) et du groupe de John van der Schaaf (professeur Chemical Reactor Engineering à l’Université de Technologie d’Eindhoven). Cette collaboration était assez évidente, explique Noël. « Il y a quelques années, Koen Kuijpers a travaillé dans mon groupe en tant que doctorant sur la mise à l’échelle de la photochimie. Au cours de ce projet, Signify, ainsi que John van der Schaaf, que nous connaissions déjà, nous avait contacté. Koen a commencé à travailler chez Janssen après son doctorat ; c’était donc une évidence de commencer cette collaboration » D’autant plus que ce sujet suscite un grand intérêt de la part de Janssen.

Saveur pharmaceutique

Le projet a été financé – à hauteur d’environ €1,2 million – par le programme de Technologie de la NWO. PhotoScale vise à construire un photoréacteur à disque rotatif capable de produire plus de 20 kg par jour de produits pharmaceutiques. Koen Kuijpers travaille sur ce projet en tant que Scientist Process Engineering chez Janssen. « Nous disposons déjà d’un réacteur conceptuel et d’une source de lumière. Nous pouvons donc commencer à tester la chimie avec notre réacteur. » explique-t-il. « Nous avons choisi certaines réactions modèles pour réduire le coût des matières premières, car le réacteur a un débit élevé et utilise donc beaucoup de matériaux. Mais ce sont des réactions modèles qui sont pertinentes pour les produits pharmaceutiques. » Noël ajoute: « Nous connaissons maintenant la « saveur » de la pharmacie, par exemple les réactions de couplage croisé sp2-sp3. Et nous essayons également de choisir des catalyseurs aussi bon marché que possible. »

Bien qu’un bon plan soit prêt, ce n’est pas une tâche facile. « Il y a encore des questions et des défis à relever » dit Noël. « Comment faire pour qu’un tel réacteur soit à la fois sûr et rapide, de manière à pouvoir produire la quantité souhaitée ? Est-il bon de créer un guide pour les utilisateurs ? Et comment la chimie réagit-elle aux sources de lumière très intenses ? » Kuijpers ajoute: « Nous avons également beaucoup de caractérisation à faire : quels sont les effets de tous les paramètres tels que les débits et la gestion de la température sur le réacteur ? Il y a encore un travail considérable à cet égard. Nous devons également créer un protocole pour tester efficacement tous ces paramètres. En raison du débit élevé, nous devons faire preuve d’intelligence dans les analyses »

Barreau d’agitation

Néanmoins, les chercheurs croient pleinement en leurs projets. « Les photoréacteurs à disque rotatif présentent de grands avantages par rapport aux réacteurs standard actuellement en vogue » explique Kuijpers. « Par exemple, ils peuvent gérer toutes les réactions multiphasiques : les réactions gaz-liquide, liquide-solide et gaz-liquide-solide peuvent toutes être réalisées dans un seul système, car nous pouvons prendre en compte la chute de pression » Vous pouvez comparer cela à la façon dont vous utilisez un barreau d’agitation, dit Noël. « Vous ajoutez votre liquide dans le réacteur rotatif, comme au labo. Et comme c’est un ensemble assez plat sur lequel la lumière brille, le transfert de photons est optimal. Il s’agit en fait d’un mélange entre un réacteur à écoulement piston et un réacteur à cuve agitée en continu (CSTR), de sorte que les réactifs bénéficient d’une bonne répartition du temps de séjour. »

Si le projet est un succès, le consortium ne prévoit pas de l’arrêter. « Nous avons pour mission de révolutionner le secteur pharmaceutique » déclare Noël. « L’argent n’est à ce moment pas, le plus important. Si vous la sécurisé avec des brevets, vous avez une chance que personne n’utilise votre invention, ou qu’ils cherchent une solution de contournement. Il vaut mieux alors le vendre comme un service, avec le savoir-faire nécessaire’. « La valeur est dans les molécules, pas dans la technologie » ajoute Kuijpers. « Vous avez également une sorte d’obligation envers les patients, il serait vraiment dommage de priver les autres entreprises d’une bonne technologie » Peut-être qu’une start-up en résultera, pense Noël. « Pour qu’il y ait une expertise à soutenir. Heureusement, les parties s’entendent bien, donc j’ai confiance que nous nous en sortirons »

Kuijpers exprime également sa gratitude envers le programme de Technologie de la NWO. « À l’université, l’étape finale vers la pratique est souvent difficile » dit-il. « Nous en sommes au stade où ce n’est plus seulement fondamental mais aussi appliqué. Nous sommes donc heureux que le NWO prête attention à ce type de projets » Noël est d’accord. « Il est de notre devoir de faire quelque chose d’utile avec l’argent des contribuables. Autour de moi, je constate que de plus en plus de personnes veulent travailler avec la même éthique. C’est une bonne nouvelle ; bien sûr, nous ne devrions pas être bloqués sur un milligramme »